OUI MAIS

Les faibles n'ont pas leur place dans un monde comme le nôtre, lui répète sa conscience, les faibles ne doivent jamais croiser la route des plus forts, continu t-elle de lui murmurer dans le creux de l'oreille, ou l'ordre devra être rétablit. Fin. Ainsi a grandit Isildure, toujours avec le même refrain en tête. Elle plonge son regard vide d'émotion -et de pitié- dans le siens. Ses antérieurs se lèvent en créant une ombre lugubre sur l'alezan qui gise déjà au sol. Pour Skuld.
Et s'abattent sur lui.

Elle mit un certain temps à retirer ses sabots de la chaire de l'étalon. Le coup fut si puissant que les blessures ne seront sûrement pas qu'externes. Après avoir jeté un dernier regard à l'alezan, elle se retire, ne souhaitant pas prendre la peine de l'achever. Elle sait qu'il ne s'en sortira pas, alors à quoi bon se fatiguer.

Ces derniers jours, il n'a cessé de pleuvoir. Le ciel triste a joué avec les nuages, qui ont pleuré son chagrin à la terre entière. Pendant tout ce temps, Ana est restée confinée à l'intérieur - protégée par le toit graveleux d'une grotte qu'elle a trouvée sur son chemin. 

Aujourd'hui, le soleil est au beau fixe. Ses rayons filtrent au travers des feuillages et caressent délicieusement la peau. Vous imaginez bien qu'Ana en a profité pour sortir respirer un peu d'air frais et se balader au détour de quelques sentiers. Mais, lorsqu'une odeur métallique envahit sa bulle de bien-être, son corps entier se crispe. Elle est mêlée à un parfum familier. Trop familier. Toute frissonnante, elle accourt presque vers la scène du crime, le cœur s'enfonçant un peu plus dans sa poitrine à mesure qu'elle se rapproche du corps qui gît sur le sol. Naska… Son pauvre Naska, la robe couverte de sang frais. Une grimace d'horreur déforme ses traits. « Na-na-nassss…ka ?  » Des larmes perlent déjà sur ses joues tandis qu'elle imagine le pire.

Naska, les traits déformés par la douleur, la robe tâchée de sang, le souffle court. Cette vision la foudroie d'horreur. Son cœur bat si fort qu'elle en entend les battements résonner dans son crâne. Sa voix est à peine audible lorsqu'elle s'exprime. « Que dis-tu ? » Elle ne comprend pas, le cerveau comme déconnecté. Tous les mots du monde lui semblent étrangers.