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Il soupira alors que l'une de ses oreilles de jais frémissait. Elle avait raison, et ça lui tordait l'estomac en fait. Je sais bien, mais j'espère que ça sera en mieux. En tout cas, ça pourra pas être pire que ce qu'on vient de quitter ! dit-il en voulant parler des terres inhospitalières.

Elle hoche la tête avec un petit sourire triste. Oui, ça c'est certain, soupire-t-elle péniblement, repensant au chaos qui avait repris leurs terres quand ils sont partis. Le Nord, ravagé par le feu. Plus de neige ni de glace. Plus rien, en fait.

Il pencha légèrement la tête sur le côté, laissant ainsi ses crins de jais tomber dans le vide. Qu'est-ce qui te manque le plus ?

Elle tourne la tête vers lui, observant son visage fin, ses courbes gracieuses, sa robe de jais. Il n'y a pas une chose qui me manque plus qu'une autre. C'est un tout. Les arbres sans feuilles me manquent. Le bruit des sabots sur la neige. La nouvelle neige tombée dans la nuit, celle encore vierge au matin. Le silence spectral des bois. Le froid de l'Hiver qui ne finit jamais. Les aurores boréales qui traversent le ciel comme des fusées errantes. L'odeur du froid, de la neige. Les grottes gelées. Le manque d'oxygène sur les montagnes.

Les yeux du noiraud glissèrent sur la robe foncée de Lövojka. Elle était taillée pour vivre dans le Nord, au froid, tout comme lui. Pourquoi donc avait-il fallut que leurs terres meurent ? L'air froid était un peu comme une drogue, pas vrai ?

En effet, elle a toujours gardé ce poil épais, chaud, idéal pour des terres au climat aussi inhospitalier que les leurs. Ses yeux brillent. Oh oui. On se sent tellement vivants dans le froid vivifiant.

On en gardera un bon souvenir, j'en suis certain. Sa voix était posée, sage. Le Nord signifiait tout pour lui, dans ses souvenirs. C'était là qu'il avait vu son fils naître, c'était là qu'il avait fondé une famille, bien qu'aujourd'hui éclatée. Et au-delà de ses propres histoires, le Royaume des Glaces avaient renfermé bien d'autres histoires.

Oh, oui. Tant d'histoires. Fille de rien et pourtant héritière de sang. Elle n'a jamais rien proclamé pourtant. Le pouvoir ne l'intéresse pas plus que ça. Elle secoue la tête, faisant voleter ses crins blancs, sans rien ajouter. Tout a été dit.

L'entier à la robe noire l'observa un instant en silence avant qu'un petit sourire ne vienne orner ses lèvres. Tu as bien évolué, Lov.

Elle tourne la tête vers lui, un peu surprise par ses mots. Elle dresse son oreille vers lui avec un sourire espiègle. Oui, j'ai perdu une oreille Et un enfant.

Il éclata de rire. C'était pas trop ce qu'il voulait dire en fait, mais bon. Si ça lui permettait de se détendre un peu, tant mieux. C'est les blessures de guerres

Oui, au moins j'ai pas perdu une jambe fait-elle en riant jaune, avec son drôle d'humour sombre. Elle lui donne un coup de tête. J'ai évolué, oui. Bien ou mal, je n'sais pas, mais j'ai changé. Elle se sent à la fois agressée de l'intérieur depuis qu'on lui a pris son enfant, comme si tout son côté sombre contre lequel elle se bat depuis toute petite était devenu plus fort, qu'on l'avait nourri, entraîné. Et à la fois, elle se trouve plus lasse, plus sage peut-être ? Elle s'ébroue, avant d'attraper quelques brins d'herbe.

Il rigola, lui aussi amusé par son humour sombre. Si ça ne lui aurait pas plu avant, maintenant, ça ne le dérangeait pas. Il reçut son coup de tête sans s'en retrouvé bousculer pour autant, mais il sourit en voyant la camaraderie qui s'était installée entre eux, comme avant. C'est toi qui choisis si tu le perçois en bien ou en mal.

Ils jugent trop, souffle-t-elle, avant d'envoyer avec son antérieur un caillou plus loin. Si je jette une pierre pour tuer un serpent, ils diront que je suis une meurtrière sans savoir s'il m'avait attaquée avant ou non. Elle fait des comparaisons, mais c'est son histoire réelle aujourd'hui. Ils ont jugé chacun des actes de sa vie comme s'ils la connaissaient par coeur. Sauf qu'ils ne savent rien d'elle. Ils ont pris un fait sans en savoir la cause, la faisant passer pour pire qu'elle ne l'est. Sans chercher à comprendre.
C'est si facile de juger sans savoir.

Il haussa des épaules, sachant pertinemment à quel point certains peuvent se montrer mesquins. Les préjugés, il connaissait aussi. C'est leur problème. Dans ce cas, ils passent à côté de plein de trucs. Que ce soit avec toi ou n'importe quoi d'autre.

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