dernière impression

B O R E A L E

Allie n'est jamais bien loin lorsque la quiétude des terres est dérangée. Voir même ébranlée. Qui était donc l'auteur de ce vacarme insupportable ? Irritable pour un rien, la sang mêlée arpente la forêt avec habilité, connaissant ses pièges et ses offrandes sur le bout des sabots. Bientôt, elle s'imposa sur le chemin d'une grande jument noire, à quelques mètres. Elle l'observe un instant en silence, se prendre les pieds dans les racines et pester. Rapidement, elle reconnaît Bryséis, sa cousine, bien qu'elles ne se soient jamais réellement officiellement rencontrées. Qu'est ce que tu fais ici ? tranche t-elle, glaciale.

Le compliment ne parvient pas à l'atteindre et sa patience est mise à rude épreuve. Elle était venue sur l'île juste pour lui dire qu'elle était un bon chien de garde ? Ses oreilles basculent lentement vers l'arrière, et ses yeux dépareillés ne lâchent pas la colosse ébène une seule seconde. Fallait-il qu'elle lui arrache les vers du nez ? Qu'est ce que tu me veux ?

Elle aimerait être une garce manipulatrice et embarquer Bryseis vers une autre réalité, mais elle était juste une garce qui souffrait. La manipulation, elle y parvenait éventuellement de part la séduction, mais elle n'avait aucune putain d’envie de la séduire, elle. Elle est consciente qu'elle pourrait la briser en deux, que Bryseis est bien plus expérimentée qu’elle. Mais elle n'a pas peur, elle affrontera son destin quel qu'il soit sans jamais plier le genou. Non. tranche t-elle. Elle redresse la tête et la regarde bien droit dans les yeux. Uniquement pour ceux qui ont un quelconque rapport avec la mort de ma mère. Pas toute sa famille, juste quelques membres.

A l'instar de l'andalouse, Boréale fronce à son tour les sourcils. Ose t-elle franchement impliquer les astres dans cette histoire ? Allie y était plus que réceptive, elle y était liée. Son nom venait à la fois du ciel et du Nord, il n'était pas anodin. Et son sang natif l’entraînait à chérir, protéger et respecter ciel, terre et mer. Je t'interdis de dire ça. gronde t-elle pourtant doucement. Ceux ne sont pas les étoiles qui ont déchiré ma mère de l'intérieur. siffle t-elle, mauvaise, ses oreilles basculant un peu plus vers sa nuque chaque fois qu'elle ouvre la bouche. Va t-en Bryséis.

Je suis de ta famille ? répète t-elle sans masquer sa surprise, laissant échapper un éclat de rire entre l'amusement et l'ironie. Mais alors vous étiez où vous tous bordel quand je suis née dans une putain de prison ? C'est pas vous qui vous êtes battues pour la liberté de ma mère et moi, mais mon père ! Et là, vous vous intéressez seulement à moi parce que je suis une menace pour votre sang. Mais ce sang c'est aussi le mien ! clame t-elle, dévoilant une nouvelle rancoeur qu'elle ne soupçonnait pas exister jusque là. J'avais l'impression de tous vous connaître tant ma mère me parlait de vous. Toi, Asmund, Hooker, June, Xander, Redjim … J'avais tellement hâte de faire partie de tout ça, de faire partie de vos vies, de vos histoires. Sa voix ne se brise pas, mais elle devient murmure, son regard se déporte sur le sol. Mais la colère est trop intense, trop flamboyante. Sa respiration s'accélère quand elle ressasse tout ça dans son esprit et ses yeux vairons dévoilent l'orage qui fait rage en elle. Ses oreilles se plaquent de nouveau contre sa nuque. J'étais prête à pardonner ce que Asmund avait fait à ma mère en lui enlevant ma sœur, j'étais prête à pardonner tout le mal que vous avez bien pu lui faire car elle, elle avait tout pardonné. Mais voilà, cette fois ça a été la souffrance de trop. Elle est morte, elle est morte ! Et c'était de leur faute, de sa faute aussi de ne pas l'avoir empêché de retourne vers eux tous. Il n'y a pas que votre famille qui a le droit de clamer haut et fort sa douleur et son droit de vengeance. Ne cherchez vous pas à venger votre sœur en ce moment même ? siffle t-elle, mesquine, glaciale. Les circonstances étaient bien différentes, mais pas dans la tête de la bicolore, le constat restait le même : sa mère avait été tué. Alors massacre moi si ça te fait plaisir Bryséis, peut être que tu arriveras à me faire ressentir autre chose que de la rage et de la colère ! lui hurle t-elle avant de se jeter sur elle, corps et âme. Elle sait, oh oui elle sait, sa parente est bien plus expérimentée qu'elle, beaucoup plus, et elle allait se faire laminer. Mais peut être en avait-elle besoin, peut être qu'elle avait besoin de souffrir physiquement pour que l'autre douleur s'estompe le temps d'un instant. C'était un acte desépéré mais vital que de se battre contre l'andalouse. Alors rageusement, elle tente de mordre un morceau de chair, peu importe où.