|When suffering is unbearable , it is sweet to hope death| Elsa

Est-ce que mon coeur le désirait ? Est-ce que je le désirais ? Est-ce que j'avais pris conscience de ce que je venais de dire et de ce qui allait en découdre ? Avais-je conscience que bientôt je ferai mes valises et je quitterai ces terres qui m'ont accueilli si longtemps ? Non. La réponse est tout simplement non. J'ai répondu sous la panique, sous la précipitation. Je n'ai pas mené une longue réflexion à ce sujet. Je suis comme un enfant à qui on a demandé de répondre "oui" ou "non" à une question parce qu'il fallait qu'il dise oui ou non. Elle ne m'a pas laissée le temps de réfléchir. Et je ne le lui ai pas dit que j'avais peut-être besoin de réfléchir. Je ne veux pas la blesser tout simplement. Je ne veux pas aggraver son cas, même si cela n'y changera rien. Je veux la rendre heureuse, en fait. 

Mes pensées n'allaient guère vers la noiraude. Elles étaient trop préoccupées à se bousculer dans ma tête et à m'en donner mal au crâne. J'avais envie d'effacer ma mémoire. A l'instant même, j'avais envie d'oublier toute cette histoire, d'oublier cette jument, et de revenir à zéro. De rester à zéro. De rester loin de tous ces tourments, loin de toutes ces agitations dans lesquelles je m'étais empêtré. Mais, instinctivement, alors que mes pensées étaient ailleurs, mon corps se mit en marche. Mes membres se suivirent les uns après les autres et commencèrent à me faire avancer aux côtés d'Elsa. 

Lorsque celle-ci s'arrêta brusquement ; elle me sortit de mes songes. Mes yeux hagards essayèrent de se poser sur un point fixe. Je ne trouvai d'autres endroits que ses deux yeux noirs, à elle. Je me plongeai dans cet abysse en ayant à peine conscience de ce qu'elle laissait s'échapper de ses lèvres. Il me semblait avoir entendu "Je t'aime", mais je n'en étais pas sûr. Et puis, même si je n'en étais sûr, je ne savais absolument pas quoi répondre. Je ne l'avais jamais dit ; à personne. Je ne sais pas ce que c'est, ça, l'amour, le fait d'aimer, et toutes ces choses-là. Ca me fait peur. Ca me raidit. Je me sens mal à l'aise d'être en face d'elle à ce moment-là. Secouant la tête pour recouvrer mes esprits, je lui souris et me contente de lui ajuster un baiser entre les deux yeux. < Allons-y. > ajoutai-je simplement. 

 

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Le ciel s'assombrissait peu à peu faisant comprendre à la jument qu'une averse ne tarderait sûrement pas et après avoir franchement réfléchis à ce qu'elle avait demandé au mâle, Elsa s'arrêta un instant. Inspirant un bon coup, la noiraude leva les yeux vers le ciel et parut distante, son coeur s'emballait pour on ne sait quelle raison. Soudain, on commença à sentir quelques gouttes jusqu'à ressentir sur soi une fine couche d'eau, une pluie délicate et froide, mais la demoiselle n'avait toujours pas bouger d'un centimètre. Les nuages recouvraient la clarté et la lumière n'était quasiment plus accessible, à cet instant, mais la femelle baissa la tête, cherchant son air. Son corps ne voulait plus rien savoir, c'est alors que par panique, la marwari se tourna vers Whiskey et cela avec le regard affolé.

Les toussotements secs et répétitifs n'arrêtèrent aucunement, en cherchant sa respiration, la survivante tentait tout pour rester bien là. Le sang se mit à couler des parois de sa bouche et la pauvre sélénite s'écroula de nouveau, son corps tremblotant. Les larmes lui montant aux yeux et s'étouffant dans son sang. Ses rêves semblaient impossible à ses yeux... Avoir une famille, un amoureux et vivre assez longtemps pour vivre aux côtés de ceux qu'elle aimait. Pourquoi ne pouvait-elle pas profiter plus de la vie? Cela lui prit au moins une bonne demi-heure avant que le tout se soit calmé et Sasa finit par reprendre des couleurs. Serrant fortement la mâchoire, la jument se sentait si ridicule et impuissante, c'était un supplice que de vivre de cette façon. Mais, après un instant, elle releva les yeux vers le bai et dans son regard, elle se voyait. Abandonner n'était pas la solution et combien elle l'avait pensé, dans le passé.

« Whiskey! Je dois te le dire. » commença-t-elle, alors qu'elle était appuyée contre son genou, sur le sol et tremblante à cause du froid de la pluie qui tombait sur son corps affaiblie. C'était un moment important et la marwari avait besoin de mettre les choses rapidement aux claires. La vie ne pourrait s'offrir à elle éternellement et la noire le savait, depuis longtemps, désormais. Le vent se mit à souffler soudainement emportant les crins de la déesse lunaire dans un mouvement de grâce. Même si elle avait maigris et vieillis davantage, sa beauté demeurait sans limite, ce qui lui laissait un peu de positif dans sa vie, après tout, ce n'était pas sa beauté qui faisait d'elle un être unique, si exceptionnel. Alors, se redressant avec misère, la jument vint se rapprocher de son précieux comparse et posa sa tête contre son encolure, sentant sa douce chaleur. « Je résisterai aussi longtemps que possible, mais reste à mes côtés quoi qu'il arrivera et je ferai honneur de cette promesse. Je suis amoureuse de toi. Tu es tout ce dont j'ai besoin et mourir seule me fait bien trop peur, tu vois... Je ne t'obligerai jamais à rester à mes côtés, il faut que cela vienne de toi et non de moi, sache-le! Tu es libre, sans obligation et sans compte à rendre à personne, si demeurer à mes côtés pour le peu de temps qu'il me reste te suffit à être heureux, cela m'ira. » finit-elle, par raconter avec la gorge serrée et nouée, sentant l'envie de pleurer en sanglot là, à l'instant.

Lentement, la pluie se changea peu à peu en des flocons et Elsa ne put s'empêcher de sourire, même si ses jours étaient comptés, elle voyait bien que la vie pouvait encore lui sourire. Ce n'était pas la fin, pas encore et pourtant son corps la lâchait doucement, mais sûrement. Le soleil n'était assez présent pour que l'on dise que c'est le jour, évidemment, la lune allait montrer le bout de son nez et les deux protagonistes devraient aller à la recherche d'un endroit pour y passer la nuit. C'était normale. El' se remit doucement en route, cherchant de la force dans ses membres pour avancer et poursuivre son chemin, mais la nuit allait tomber rapidement. C'était peut-être sa dernière chance de passer une belle nuit en compagnie de celui qui lui fait tourner la tête. Ce baiser que l'étalon lui avait fais entre les deux yeux lui avait un bien fou et l'avait gêné un peu, mais la sélénite en avait été très charmés. « Et si nous passions une toute dernière nuit sur les terres de Galop Sauvage juste tous les deux? Présentement, je me sens pas encore prête de partir là tout de suite, mais d'ici quelques jours, est-ce que cela te conviendrait? » demanda-t-elle, avec douceur et les émotions bien présents, aux centuples. Quitter les terres étaient une décision difficile et réfléchie, mais Elsa savait qu'elle faisait le bon choix, c'était la chose à faire, après tout. N'est-ce pas?

Alors que je lui avais emboîté le pas, alors que nous étions l'un à côté de l'autre, alors que nous étions sur le point de partir à l'aventure loin de Galop Sauvage, la noiraude s'arrêta soudainement. Interloqué, un de mes sourcils ne put s'empêcher de se hausser sur mon visage. Que se passait-il, encore ? Gardant le silence, j'observais Elsa qui semblait être prise d'une nouvelle crise. C'était donc cela ma nouvelle vie, celle que j'avais accepté de suivre ? Oui. Il fallait clairement que je me fasse à cette idée de voir dépérir celle que j'affectionnais. Il fallait que j'accepte de voir se décomposer celle que mon coeur semblait avoir choisi. Quelle triste fin ! Pourquoi n'étions-nous pas le Prince et la Princesse comme dans les contes pour poulains ? Ceux qui se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ? Pourquoi ne pouvait-on pas avoir une histoire similaire ? Le destin était fichtrement mal foutu. Regardant totalement immobile, la noiraude crachait du sang, je ne savais pas quoi faire. J'étais dépourvu de toutes idées. Et après tout, qu'est-ce que j'aurais pu faire pour l'aider ? Rien. Absolument rien. Ce n'était qu'un cheminement logique. La seule chose qui me vint à l'esprit fut de la soutenir et de lui montrer que j'étais là ; qu'elle devait se battre pour moi, qu'elle devait combattre la maladie pour nous. Alors, doucement et tendrement, je laissai mon encolure se baissait et mes naseaux vinrent lui effleurer les tempes. Un souffle chaud s'échappa de ces derniers et tentèrent du mieux qu'ils le pouvaient, d'encourager Elsa à contrôler et à surpasser sa crise. 

Lorsque ce fut fini, je fus comme rassuré. Je me redressai tout en expirant longuement et bruyamment. C'était passé. C'était presque fini. Mes muscles se détendirent et mon esprit s'apaisa. Comme si elle en avait encore réellement la force, Elsa m'interpella. J'avais envie de lui dire de se taire et d'arrêter de s'épuiser avec des paroles. On n'avait plus le besoin de parler, on s'était déjà tout dits. Enfin, c'est ce que je croyais ... Peut-être pour se rassurer, la noiraude me demanda encore une énième fois si c'était vraiment ma décision de la suivre et de fonder quelque chose à ses côtés. Certes, peut-être n'avais-je pas employé des mots assez clairs, peut-être n'avais-je pas montré une attitude enjouée, mais j'étais comme ça. C'était moi. Et elle savait comment j'étais, bon dieu. Alors pourquoi vouloir savoir cela ? Se rassurer, surement. Lâchant un long souffle, presque d'exaspération, je répondis avec une voix monotone. < Ne perds pas ton temps pour des futilités. Je ne reviens jamais sur mes décisions. Je t'ai dit que je te suivrai, je t'ai dit que je serai à tes côtés, alors je le serai. N'en doute pas et contente-toi de te calmer et de garder le peu de force qu'il te reste. Un long parcours nous attend et j'ai besoin que tu sois assez forte pour y parvenir. > Mon regard était presque devenu dur, mais peut-être se voulait-il plutôt paternel au fond. Je lui donnai un dernier petit coup de nez, au niveau de l'épaule et je décidai moi-même de reprendre la route. En même temps que mon corps se mouvait, je rajoutai < Oui, je comprends. D'ailleurs, nous ferions mieux de trouver un endroit où passer la nuit. Elle risque d'être froide et difficile pour toi. >

La jument n'avait pas eu la vie si facile et aisé qu'elle s'était imaginée, mais en étant bien accompagnée, celle-ci ne voyait pas l'utilité de se plaindre. Whiskey était un partenaire plus que parfait pour elle et cet amour qu'elle lui vouait était pleine de sagesse, de pureté. Aux paroles du bai, un fin sourire se dessina sur son visage et cette même joie de vivre enfantine qu'elle avait l'habitude d'avoir vint enfin. C'était en quelque sorte un nouveau départ et Elsa ne pouvait que persévérer dans ce chemin, tout finirait par s'arranger. Ne disait-on pas que l'espoir faisait vivre les gens? La sélénite allait essayer d'avancer sans tomber et avec l'étalon à ses côtés, la noiraude y parviendrait, assurément. Aussitôt, ils se mirent à avancer et la jument chercha du regard un endroit pour y passer la nuit avec le mâle. Au loin, ce fut à ce moment qu'elle trouva un abri et doucement, elle s'y rendit calmement. C'était une grotte et elle était agréable, une belle place pour les deux personnages. La survivante attendit que l'étalon vienne s'installer à ses côtés et lui sourit tout simplement, chaleureuse.

Laissant mon regard errer parmi les étoiles qui s'installaient au fur et à mesure que la nuit tombait, je rêvassais à une vie bientôt meilleure que celle que j'avais vécu sur Galop Sauvage. Je pris le pas afin d'emboîter celui de la noiraude ; l'esprit totalement ailleurs. Je marchais sans m'en rendre compte. J'avançais sans savoir où j'allais, où nous allions. Quand nous arrivions près d'une immense bouche de pierres, je souris ; satisfait d'avoir trouvé un endroit pour passer la nuit. < Nous serons bien ici. > ces mots s'échappèrent de ma bouche pour établir comme un constat à moi-même. Mon corps était fatigué de cette journée et j'étais convaincu qu'Elsa l'était d'autant plus. Je m'avançais vers notre nid douillet et un souvenir m'envahit. Je me souvenais de cette affreuse nuit, où il pleuvait abondamment, où Elsa me collait au basque et où nous nous étions réfugiés dans une grotte ; comme celle-ci. La noiraude avait eu sa première crise sous mes yeux et c'était à ce moment-là que j'avais commencé à m'intéresser réellement à elle, à éprouver un je-ne-sais-quoi envers elle. Mais aujourd'hui, il ne pleuvait pas et Elsa irait bien.
Enfin à l'entrée, je jetai un coup d'oeil pour savoir si la zone était vraiment hors de tout danger. Rien ne laissait présager que nous serions embêtés. Avec un sourire, je me tournai vers Elsa et lui annonçai < On va pouvoir se reposer, maintenant. > Je me couchai aussitôt à ses côtés et lui déposai un nouveau baiser entre les deux yeux.