‹ ash and dust ›

Il fronce un peu les sourcils avec un sourire amusé. « Tu sais, il en a vécu des choses. Si je dois te raconter toute sa vie, ça risque d'être long C'est ça que tu veux ? »

Oros se met légèrement à rire. « Mon père n'a pas vraiment connu ses parents. Son père était un assassin vagabond, de passage ici, et sa mère un monstre de la pire espèce, qui l'a laissé pour mort. Mais il a été recueilli par une jument d'ici, qui l'a élevé. Avec d'autres orphelins de sa génération, il a formé un club très soudé, très fraternels : les Jolly Rogers. Il n'était encore qu'un yearling lorsque le Nord s'est retrouvé sans leader. Il s'est proposé, sans réel espoir, et il s'est vu élu à la tête du territoire. C'est à peu près vers cette période qu'il a commencé à comprendre que son attirance et son attachement à Nox était plus qu'une simple amitié. »

Dans une position confortable, le blondinet fait de même, reposant sa tête sur le dos encore fin de la rouquine. « Oui. Mon père disait qu'il le savait depuis qu'il était tout petit, mais qu'il n'a pu se l'avouer et l'accepter que beaucoup plus tard. C'est pour ça que, d'abord, il a eu une compagne "officielle", Mara, ta maman, pour cacher sa relation avec ton père. Elle en était pleinement consciente, même si elle était amoureuse de lui aussi. » En racontant, le Lion se rend compte que les histoires de leurs parents étaient quand même drôlement compliquées.

Il serre un peu les dents. Première erreur, peut-être. « Ils s'aimaient peut-être, tu sais, je n'en sais rien, je ne leur ai pas demandé, j'ai un peu mal pris le fait qu'ils soignent leurs blessures ensemble après la mort de mon père. Pour moi, ils le trahissaient. Mais heureusement qu'ils l'ont fait, sinon tu ne serais pas là. » Il sourit, même si elle ne peut pas le voir.

« On aurait pu oui, mais Dieu merci il me semble que nous n'ayons aucun lien de sang toi et moi » Pourquoi Dieu merci, au juste ? Est-ce qu'il envisage un jour quelque chose ?
Disons qu'il ne barre aucune possibilité, plutôt. Il secoue sa crinière d'argent, avant de remettre sa tête sur son dos. « Puis il y a eu Ramses. Un être cruel, qui a jeté la terreur sur les terres, enchaînant les victimes. La mère de mon père a été lâchement tué par lui, d'ailleurs, bien qu'elle était de la même espèce de monstre. Puis.. ton père est mort une première fois. » Oros ferme les yeux. Je te promets, il était mort. Il était devant moi, je le touchais, il était mort, il ne respirait plus, il était froid, il était déjà parti. Comment j'aurais pu croire qu'il reviendrait un jour ? Il était mort. Crois-moi, Oroszlàn, il était mort. Dans mes bras. Alors, j'ai sombré, avec lui, mais en restant là. Comme un fantôme condamné à errer après son assassinat. Les mots de Murphy sont encore là, dans son coeur, dans sa tête. Il tressaille, il ignore si la petite est au courant de cette partie-là.

Oklm

Il soupire doucement avec un fin sourire. « Non. Nox a raconté à Murphy qu'il s'était fait soigner par des humains. Mais entre temps, son absence ici a bouleversé tout le monde. Mon père en est devenu fou. Fou de douleur, fou d'amour. » Il caresse doucement le dos de la petite, comme pour surmonter cette période difficile qu'il s'apprête à raconter. « Il s'est inventé une deuxième personnalité. Solheim. Certains disaient qu'il était juste schizophrène, mais je sais que mon père ne l'était pas. C'est le Diable qui s'était.. emparé de son âme fragile. Alors après, quand Nox es miraculeusement revenu.. qu'est-ce que cela pouvait changer ? Le mal était déjà là, au creux de lui. Mon père l'a d'abord.. rejeté, il lui a hurlé dessus. Puis ils se sont retrouvés, mais ça n'a jamais été comme avant. » Il fait une légère pause, les yeux humides.

Il se rassure et se conforte par la présence et le contact de la rouquine, lui aussi. « Ça m'a posé beaucoup de problèmes. Mon père m'a confié toute son histoire lorsque j'étais si jeune, dans l'urgence de ce qu'il savait être sa mort prématurée, que parfois j'ai l'impression de m'être fabriqués des souvenirs de sa vie à lui. » confie-t-il doucement. Il ne l'a pas souvent avoué, mais il lui arrive de croire connaître une connaissance de son père comme s'il avait vécu lui-même les épreuves de son géniteur. « Beaucoup ne croyaient pas à son histoire de possession. Au récit de ses démons, de ce Diable qui était en lui. Mais tous ceux qui étaient là à son dernier jour n'ont pas pu nier qu'il se battait. Contre quelque chose qui était à l'intérieur de lui, qui parlait pour lui, qui agissait parfois pour lui. »

« Je pense qu'il l'aurait fait, tu sais, si.. s'il avait pu deviner que ça arriverait. » Il décide de ne pas parler de la mort de Nox, et hoche tristement la tête aux commentaires de la petite. De ne pas y croire, c'est légitime. « Je n'y croyais pas vraiment non plus jusqu'au dernier jour où je l'ai vu se battre contre l'autre. Alors, quand j'ai compris que ça n'était pas vraiment lui, que mon père, le vrai, était sûrement parti depuis longtemps, je l'ai poussé. » L'avoeu n'est pas facile à faire. Avouer qu'il a fait sombrer son père, l'image de toute son admiration, ce n'est pas chose aisée...