ENFANT TERRIBLE

ISILDURE

Enfant terrible,
Archétype du diable qui sème parmi les épices et les fruits
Des graines de doute, des graines qui vont
Contre l'amour et sa définition
À laquelle les gens s'y prennent, s'attachent, se promettent
D'attendre.
Votre visage taillée d'or réside parmi mes yeux,
Et vos mots sont étranglés par ma peur du noirceur;
Je n'ose pas les répéter.

Enfant terrible,
Vos questions m'achalent; ils piquent mes yeux, mon âme.
Des plus beaux et mélancoliques hallalis je vous entend,
Et votre voix me rend pénitence autant qu'elle me rend folle.
Oui, je l'aime, mais vous savez?
L'amour est assez fort; le pouvoir, par contre, est perdurable.

La Reine se réveille en sursaut, la robe humidifiée par les litres de sueur dont elle s'adonne.

Aslaug se glisse entre les roches, tombant souplement dans le lit de la rivière qui a creusé la gorge. Une tâche noire attire son attention et la nordique décide de s'approcher d'un pas lent et mesuré. Isildure se tient non loin d'elle. Aslaug décide de s'arrêter.

La grande jument se relève habilement et se glisse dans l'eau pour refroidir son corps brûlant. Elle clôt les paupières le temps de se calmer. Une odeur familière vient chatouiller ses naseaux. Isildure n'oublie pas les personnes intéressantes. Sans rouvrir les yeux, elle s'adresse à l'arabe. Aslaug.

A l'écoute de son prénom, elle s'arrête. « Isildure » Salut la nordique sans reprendre sa marche, se tenant à une distance raisonnable de la Reine des Sables. « Nuit agitée ? » Demande-t-elle sans vraiment s'attendre ou s'intéresser à une réponse.

Elle ouvre les yeux. Rêve damné. Plus communément appelé cauchemars non ? Non. Les cauchemars reflètent nos plus grandes craintes. Et Isildure n'en a pas. Elle déteste beaucoup de choses, mais ne les redoutes pas.

« Qu'est-ce qui te traverse l'esprit ? » S'enquit sans plus de politesse Aslaug qui sait qu'Isildure se fiche des formes de la conversation et s'intéresse bien plus au fond.

Le passé.. ou l'avenir je ne sais pas. Avoue t-elle en plongeant son regard dans la surface azure, méditant durant quelques secondes. Elle reporte lentement son attention sur Aslaug.

Aslaug rive ses yeux vers l'eau puis y plonge ses naseaux tout en avançant. « Ainsi Isildure la grande, peut être dérangée par son passé, son avenir, sa vie ? » Fait-elle avec un rictus mais sans ironie ni méchanceté. La nordique cherchait à tâter l'humeur de la reine, pour peut être pouvoir s'y confier, se répandre de ses idées, de ses rêves et de ses craintes.

Elle sourit face aux paroles d'Aslaug, qui aurait cru. Isildure la grande, répète t-elle, peut-être dérangée par beaucoup de choses. Beaucoup de personnes surtout, mais l'arabe n'en fait heureusement pas partit.

Aslaug garde le silence, elle observe la Reine d'un oeil serein, presque satisfait de voir qu'Isildure a des failles et peut en souffrir. Elle ressemble à la nordique et cette dernière en est rassurée. « Que vas-tu faire pour ne plus être dérangée ? » Bien sûr, Aslaug prêche l'information, bien qu'elle espionne pour le compte de la dominante des Sables, elle ne joue pas moins cavalier seul.

Elle fixe un point inexistant, qui semble extrêmement intéressant. Les paroles d'Aslaug résonnent dans son crâne. Que faire pour ne plus être dérangée, que faire pour chasser ces maudites visions ? Rien, c'est impossible. Il faut creuser plus profondément ses préoccupations, jusqu'à en trouver la véritable signification. J'interroge les Oracles. Confesse t-elle comme si c'était quelque chose d'anodin.

La voix d'Isildure fait tressaillir Aslaug qui relève la tête et sort de l'eau, s'adossant légèrement contre la paroi rocheuse. « J'espère qu'ils seront plus cléments avec toi qu'ils ne l'ont été avec moi » Marmonne-t-elle en faisant crisser sa peau contre la roche à laquelle elle est appuyée. Aslaug avait interrogé les astres, avait cherché des réponses. Et finalement rien ne lui avait été donné. Elle avançait dans la brume, donnant les clefs de son destin au hasard.

Et que t'ont t-ils dit ? Interroge Isildure, curieuse de connaître les tourments d'Aslaug pour pouvoir les comparer aux siens. Elle n'imagine pas une seule seconde que les révélations qu'elle lui demande peuvent être personnelles, voir secrètes.

« Ils ne m'ont simplement pas répondu » Crache Aslaug alors qu'elle piétine nerveusement le sol, toujours loin d'Isildure. « Mais finalement, je n'ai pas eu besoin d'eux » Annonce-t-elle en se redressant, le poitrail bombé et le pas plus lent encore qu'il ne l'était jusque là. Si elle se vouait auparavant au destin, aujourd'hui elle croyait uniquement en sa capacité à changer les choses. « Le dominant des Glaces a subi une violente défaite face à moi. Je suis la dominante des Glaces » La fierté qu'on entend dans sa voix est plus sombre que ce qu'elle pensait.

Pardon ? Cette nouvelle frappe Isildure. Alors elle a réussit. Ses oreilles pivotent d'avant en arrière, et elle se mord la lèvre pour que son sourire ne s'étende pas trop. Félicitations. Lâche t-elle. Fini le règne de Sydän le clément, place à Aslaug la valeureuse. A la tête du troupeau le plus peuplé de GS. Étonnement, la Reine n'éprouve aucune jalousie. Un soulagement peut-être ? Ou une vaine méfiance ? Seul l'avenir nous le dira. Si il y a bien une personne que l'ibérique respecte, ne serait-ce qu'un minimum, c'est bien l'arabe. D'autant plus sous ce nouveau devoir. Poliment, elle lui adresse un léger signe de tête.