le grand retour

Comment vivre sans ? demande-t-elle sincèrement, ayant depuis toujours sentie cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Cet héritage sombre qui fait partie d'elle à présent, comment.. comment faire pour l'oublier, puisqu'il est si présent ? Elle soupire, en guise d'excuses peut-être et garde ensuite le silence, un peu troublée.

Mais Lov secoue lentement la tête. Je n'ai jamais été joueuse, tu sais. Notre rencontre n'était que le fruit du hasard, jamais avant je ne m'étais prêtée à de tels jeux et j'ignore comment le faire à nouveau. Même enfant, elle ne ment pas, elle n'avait jamais eu l'occasion de jouer. Un peu à l'écart des autres poulains déjà, hantée par son statut d'enfant non-désiré, d'erreur de la nature. Mais.. je veux bien passer du temps avec toi. Si tu en as envie, bien sûr. Elle lui offre un demi-sourire, précieux quand on sait qu'ils sont rares chez elle.

Elle le laisse s'approcher, bien que son corps et sa tête soient en alerte. Elle tente de garder le contrôle mais elle n'a qu'une envie : le repousser violemment. Non pas que cela soit contre lui. Mais peut-elle encore seulement tolérer une autre présence à ses côtés ? Supportera-t-elle un contact physique, aussi futile soit-il, sans se remémorer cette chute, longue et terrible ? Elle retient son souffle, le fixant avec une lueur de... crainte ? dans les yeux. Elle déglutit, tente de se calmer, et finalement, rompt elle-même le dernier mètre pour écraser son épaule massive avec lenteur contre celle de l'isabelle.

Elle se laisse faire, les membres tendus, tout son corps ne lui criant qu'une chose : partir. S'écarter, tout faire pour ne pas se laisser brûler. Si ses ailes ont cramé depuis bien longtemps, sûrement y a-t-il encore des choses en elle capables de brûler. Elle ne dit rien, le laissant faire, tentant seulement de garder le contrôle.

À sa demande, docile pour une fois, elle tente de contrôler ses tremblements. Elle y parvient assez bien et soupire doucement contre son encolure. J't'aime bien, tu sais. Et c'est assez rare, qu'elle apprécie quelqu'un, en fait. Mais bon, il doit bien le savoir. Elle relève ses grands yeux d'ombres vers lui.

Elle est un peu frustrée qu'il prenne son aveu avec autant de légèreté. Il a été difficile pour elle de le formuler. Mais elle n'en montre rien, et se contente de hocher la tête. Oui, merci. Il ignore peut-être la vérité : ça n'ira jamais mieux. Elle n'ira jamais bien, et quand bien même ce serait le cas, ses démons s'assureront toujours de la torturer.

Elle penche la tête sur le côté, laissant ses crins emmêlés dégringoler le long de son encolure musculeuse. Où veux-tu aller, maintenant ? souffle-t-elle doucement, comme une invitation à rester à ses côtés.